FRONDEURS ET FIDÈLES

sur la base d'un texte rédigé par Patrick DECLÉTY de la Linares

 

 

Chaque promotion de Saint-Cyr a une personnalité qui n’appartient qu’à elle seule.

Cette personnalité résulte d’une alchimie subtile entre trois facteurs principaux :
- l’âme de Saint-Cyr héritée des anciens ;
- les circonstances qui ont jalonné son existence, notamment les premières années en y ajoutant la période de préparation au concours ;
- les individualités de ceux qui la composent.

Ainsi, notre promotion a sa propre personnalité.
 

Les 240 élèves-officiers (étrange coïncidence avec ce nombre mythique à la Spéciale !) de la Linares constituent une promotion marquée dans son subconscient par les évènements dits de "Mai 68". De ce fait en 1972, la majorité d’entre nous a débarqué à Coëtquidan dans une posture à contre-courant des mouvements gauchistes qui sévissaient alors, mais néanmoins habitée par un esprit frondeur.

Nous n’avons donc pas tardé à détonner dans la vénérable École qui de plus traversait une période qualifiée de charnière dans ses méthodes pédagogiques. Ainsi les "chevaliers de la mitraillette" (sic) bravèrent-ils l’autorité pour certainement apprendre à mieux l’exercer par la suite.

Heureusement nos instructeurs veillaient et remplirent leur mission de formation avec conscience, fermeté et même bienveillance.
Nous nous engageâmes alors "sans mollesse" (une autre de nos devises) dans des carrières marquées par d’innombrables changements.

Dans le domaine opérationnel, nous avons contribué à gagner la 3e Guerre mondiale, la fameuse “guerre froide” face au Pacte de Varsovie, tout en intervenant dans les secousses de nos anciennes colonies. Puis, à la suite de la chute du mur de Berlin, nous avons connu la multiplication des opérations extérieures (OPEX) et la défense du sol national (OPINT) avec le lancement du plan Vigipirate.

Dans le registre humain nous dirons adieu à la conscription pour bâtir une armée professionnelle. Dans le domaine organisationnel, nous traverserons une multitude de réformes, de restructurations et même une "refondation", sans oublier la mise en œuvre d'un "commandement matriciel".

Alors oui, nous faisons partie des promotions de transition et pensons y avoir tenu notre place.

L’âge venant, nous avons quitté l’uniforme (quelques pionniers l’ont même fait depuis de nombreuses années). Cela n’a pas marqué pour autant la fin de notre engagement à servir.
Plusieurs se sont lancés dans le monde de l’entreprise, d’autres se consacrent désormais à leurs convictions religieuses. Ainsi, outre de nombreux cadres militaires de haut niveau, la Promotion compte deux ambassadeurs, un administrateur de l’Institut de France, un consul général, un maire, des vice-présidents ou conseillers de président de grande société...
Dégagés de certaines contraintes statutaires, plusieurs défendent et même promeuvent leurs valeurs, n’hésitant pas à descendre dans la rue s’il le faut, ou à rédiger des ouvrages parfois dérangeants (tant dans le domaine historique que dans celui des questions de Défense ou de géostratégie).

 

Aujourd’hui encore, portant fièrement le brillant patronyme de ses deux parrains,
la Linares demeure conforme à ce qui constitue sa marque de fabrique :

                                              Frondeurs du major au culot, nous le restons en toute loyauté.
                                              Fidèles à nos valeurs et à nos engagements, nous le demeurons en toute sérénité.

 

Et son cri de guerre résonne toujours haut et fort : « Linares et sans mollesse. »